mardi 25 juillet 2023

Des visiteurs venus de loin

Lors du dernier arrachage de pommes de terre (juillet 2023), quelle surprise de trouver, sortie de terre par l’arracheuse, une chenille de grande taille et de toute beauté. La trouver ici n’est pas du hasard, en effet, c’est une dévoreuse bien connue de feuilles de pommes de terre : la chenille du plus grand papillon d’Europe, le Sphinx à tête de mort ! Son nom latin -Acherontia atropos- lui vient d’un dessin en forme de tête de mort sur le thorax [dans la mythologie grecque, il fallait traverser le fleuve Acheron pour parvenir au séjour des morts].

Ce papillon d’une envergure d’une dizaine de centimètres peut parcourir de très longues distances de plusieurs milliers de kilomètres dans sa migration annuelle à partir du Proche-Orient ou de l’Afrique tropicale. Arrivée au printemps, la femelle pond ses œufs, de préférence sur des lieux de nourriture comme notre champ de pommes de terre, qui donnent naissance en été à de magnifiques chenilles qui s’enterrent et se chrysalident en automne. La plupart du temps, les températures hivernales de nos régions n’autorisent pas la survie de la chrysalide qui hiberne.  Plus l’année est chaude, plus ils migrent plus au nord, en trouver chez nous en ce moment se comprend avec les canicules de l’an dernier. Si les chenilles étaient nombreuses, et certaines peuvent atteindre une dizaine de centimètres, elles pourraient causer de gros dégâts dans les cultures. Cette chenille qui vit donc de juillet à octobre possède parmi ses caractéristiques, une corne en forme d’S en sa partie postérieure.

La mauvaise réputation de ce papillon de nuit lui vient non seulement des dégâts qu’il peut causer dans diverses plantations, outre les pommes terre, il n’hésite pas à s’attaquer aux tomates, aubergines, carottes… mais aussi d’une particularité étrange : il émet un son strident et puissant lorsqu’il est dérangé, ce qui est à l’origine de nombreuses légendes dans les villages africains d’où il est en partie originaire. Il ne s’appelle pas « tête de mort » pour rien, friand de miel, il n’hésite pas à s’introduire dans une ruche protégé des piqures par son épaisse fourrure…étrange visiteur cette année dans nos cultures !

Texte et photos de Christian Bernard